L’étape est un peu plus longue que d’habitude entre Barbuda et Saint Barthélemy : environ 60 miles nautiques. Petrushka n’est pas très rapide, il n’y a guère de vent ces derniers temps et par sécurité, nous tenons à arriver de jour. Nous nous réveillons donc à 2H00 le 27 mars pour quitter notre mouillage de Barbuda à 2H 45. La nuit est étoilée. Le phare de Codrington est derrière nous, sur le lagon, et l’antenne flash du petit aéroport également, qu’on apercevra jusqu’à 15 miles au large. Les fonds marins sont très hauts et très plats. Nous devrons parcourir plus de 10 miles avant d’avoir des profondeurs de 20 mètres.
Cap 183° vers Saint Barthélemy. Je veille jusqu’au lever du soleil pendant que Christian achève sa nuit. J’aime bien naviguer de nuit par temps calme. Je compte les étoiles filantes. Pas assez des doigts de mes deux mains… La lune est paresseuse. Elle se lève à peine deux heures avant l’aube. Au lever du soleil Christian apparaît, à temps pour voir deux dauphins qui bondissent près de Petrushka.
On se prend un frugal petit déjeuner. Il y a à peine 10 nœuds de vent, on avance lentement. Je me couche un peu et au bout d’une heure Christian me réveille, excité, car il a attrapé un poisson au bout de sa ligne de traîne, un petit barracuda. On le mangera ce soir. A partir de midi, c’est la pétole, les voiles pendouillent tristement. Vers 13H00 on remet un peu de moteur, il nous reste 15 miles à parcourir.
Il fait très chaud, on se cache du soleil. A quelques miles de Saint Barth, alors que Christian ferle la grand voile, une baleine nous montre son dos, puis avec sa queue donne de grandes claques sur la mer. Elle souffle ensuite son jet d’eau de pommeau de douche renversé. Nous sommes ravis du spectacle.
Les côtes de St Barth apparaissent, splendides, sèches, rouges, rocailleuses, très découpées. L’île est incroyablement vallonnée, sans avoir pourtant de massif dépassant 300 mètres d’altitude. Une terre aride donc, avec des arbustes, des cactus-cierges, peu d’arbres, à l’exception de quelques cocotiers et lataniers dont les fibres sont encore utilisées pour fabriquer les célèbres panamas. Quelques grosses villas sont accrochées aux pentes raides. Nous arrivons à Gustavia vers 17H00. On ancre à « Baie Public » au milieu d’un bon paquet de bateaux de toutes sortes, de toute origine. Notre voisin bâbord, un petit rafiot-caravane assez miteux, abrite un chaton noir que nous admirons beaucoup. Nous rêvons de le kidnapper. Nous nous contenterons de lui déposer, le lendemain, des croquettes pour chaton avec un petit mot à l’intention de son propriétaire « de la part de 2 admirateurs ».
Au mouillage, nous retrouvons « Yakataka » de Nicole et Luc. On se salue et on se donne rendez-vous à la douane. Les formalités accomplies, quelques courses et une connexion internet plus tard, nous faisons une brève reconnaissance de Gustavia. C’est tout petit. Les abords de la marina ne sont que boutiques de luxe mignonnes à très chics. St Barth est le St Tropez des Antilles. La population est quasi exclusivement blanche. Les 5000 habitants sont les descendants des Normands et des Bretons qui s’installèrent ici voilà plus de trois siècles. Ces antillais sont donc majoritairement blonds aux yeux bleus. Ils résistent depuis 30 ans à toutes les tentations du tourisme de masse. Pas d’immeubles, interdiction de bâtir une maison plus haute qu’un palmier. Les Saint-Barths (ou Babath’), qui ne souhaitent pas voir leur île envahie par des hordes de touristes en mal de soleil, ont opté pour la sélection par l’argent. L’île est ainsi devenue un paradis pour milliardaires, stars et autres membres de la jet-set. Cette terre minuscule (25 km², le tour est bouclé en moins d’une demi journée, en voiture) est pourtant restée très paisible et sobre. Rien à voir. Ici on se repose, on se baigne, on rêve, on prend le temps…
Pour quitter la petite ville de Gustavia, ce ne sont que ruelles aux pentes tellement raides que nous sommes découragés d’avance. Pas envie de jouer aux montagnes russes sur ces routes de ciment. Nous nous contentons donc de visiter les abords immédiats du la marina. Il y a là suffisamment à admirer, on trouve encore des vestiges du passé suédois de Gustavia, qui se prépare à accueillir, du 31 mars au 2 avril, une course prestigieuse. Les concurrents arrivent au quai d’honneur. Quelques uns sont déjà là : Endeavour, Ranger, Victoria, Shamrock, Ticonderoga of Greenwich, … De belles bêtes de course entre 70 et 80 m de long, racées, élégantes, menées par des équipages professionnels.
En fin de journée, nous sommes invités sur Yakataka pour l’apéro. Nous y faisons la connaissance d’Agnès et Jean-Marie, couple toulousain qui navigue sur un catamaran identique à celui de Nicole et Luc (un Switch 51) « Na Maka ». Ayant navigué au Venezuela, ils nous rassurent sur les conditions de navigation dans cette zone. Nous comptons y descendre aussi mais jusqu’ici nous avons eu des informations inquiétantes parlant d’attaques de bateaux, de vols et d’agressions. Agnès et Jean-Marie nous redonneront confiance, les îles du Venezuela ont été très tranquilles pour eux. Il ne faut pas avoir peur d’aller au-devant des habitants, et des pêcheurs en particulier, piliers de l’économie locale. Ils sont généralement ravis de renseigner le voyageur sur les choses à faire et sur celles à éviter. Nous voilà réconfortés, nous garderons notre projet.
Nous restons deux jours au mouillage de Gustavia puis nous déménageons pour l’Anse Colombier, au nord de St Barth. L’endroit est tranquille, aussi beau que paisible. La plage n’est accessible qu’en bateau ou à pied après une randonnée sur un sentier surplombant les falaises. Au mouillage, à côté des bateaux, nous voyons de temps en temps comme de gros cailloux ovales surmontés d’un petit périscope qui se lève deux fois puis disparaît. Le caillou coule ensuite en montrant son petit gouvernail. Ce sont les majestueuses tortues de mer. Au Colombier, nous aurons l’occasion de les admirer sous l’eau. Le fond de sable est tapissé de grandes herbes qui leur servent de salade. Elles broutent en nous observant de leurs grands yeux placides.
On est drôlement bien à ce mouillage sauvage ! Spectacle sous l’eau et spectacle sur l’eau. En face de la baie, les bêtes de course s’entraînent et font les derniers réglages pour la régate du week-end ; on sort toute la toile, on envoie le spi, on vire de bord, on empanne, … précision et rapidité de manœuvre, c’est époustouflant.
Le magnifique 5 mâts du Club Med ...
Nous ne restons pas pour la régate et le 31 mars, nous quittons St Barth pour sa voisine Saint Martin, en passant par l’île de la Fourche puis l’îlot de Tintamarre. Plus de vent. Nous sommes cette fois au moteur. Devant Tintamarre nous voyons s’ébattre deux cachalots.
Grâce à une reprise de vent favorable, nous envoyons le gennacker (grande voile d’avant très légère) pendant une heure. Le vent retombera ensuite et nous serons obligés de l’affaler. Nous aurons cependant pu vérifier que le bout-dehors que Christian a fait installer en Martinique est efficace.
Nous contournons St Martin par l’est puis par le nord et nous atteignons notre latitude nord extrême : 18°07'819 N – 63°01'996 W avant d’arriver au Marigot, la capitale française. St Martin est un port franc et nous souhaitons y acheter quelques équipements. L’île est surprenante à plus d’un titre. Avant tout pour son extraordinaire coexistence politique. La France et les Pays-Bas se partagent ce petit territoire dans la plus parfaite harmonie depuis 1648. Christophe Colomb découvrit l’île en 1493 lors de son second voyage (toujours la même histoire) mais les Espagnols s’en désintéressèrent vite (manque d’eau, pas d’intérêt stratégique). Quatre Français et cinq Hollandais qui habitaient l’île prévinrent leur gouvernement respectif du départ des Espagnols. Chaque pays envoya une flotte. Et pour une fois, au lieu de s’empoigner et de se trucider, les deux nations décidèrent de se partager l’île par traité. Trois siècles plus tard, l’accord tient toujours. Et nul douanier ni contrôle policier à leur frontière.
Les habitants sont majoritairement noirs et parlent … anglais. Les paquebots débarquent leurs cargaisons de touristes américains qui envahissent les boutiques hors taxe de Philipsburg, la capitale hollandaise. Dans la partie sud de l’île, hollandaise, l’influence américaine est en effet prépondérante. La partie nord, française, est rattachée administrativement à la Guadeloupe et en a suivi l’évolution politique, sous la forme d’un canton.
A Marigot, il n’y a pas grand-chose à voir ou à faire, à part la marina et le bord de mer, le marché du mercredi ou du samedi matin ou, vers le port, les vieilles maisons en bois de style caraïbe. Il y a aussi l’immense lagon de Simpson Bay, traversé par la frontière, et où sont installés les marinas, la plupart des ateliers de réparation et les shipchandlers free tax.
Dans la grande baie de Marigot il y a des centaines de bateaux. Nous y retrouvons « Yakataka » et « Na Maka » et nos amis. Le mouillage n’est pas très confortable à cause d’un fort clapot quasi permanent. La vue sur la côte n’offre pas d’attrait particulier. La plage est surmontée de nombreuses constructions. Au large, en face, se déroule l’île d’Anguilla, toute en longueur, également très bâtie. Le soir, Anguilla n’est qu’un long ruban illuminé.
Nous passons quatre jours à Marigot, occupés par l’avitaillement, travaux d’entretien, la lessive, le repérage du matériel à acheter chez le grand shipchandler installé dans la partie hollandaise du lagon, les visites et discussions avec nos amis, l’achat du matériel. Pendant une longue navigation, certains équipements s’usent et doivent donc être remplacés, d’autres doivent être améliorés pour faciliter la manœuvre.
Nous quittons (enfin) le Marigot pour un petit mouillage comme je les aime, calme et isolé, à la Anse Marcel. Là, nous allons avec notre dinghy, à la rame pour une fois (nous partons le lendemain, pas envie de monter le moteur hors bord pour si peu), découvrir le chenal qui démarre en bord de plage et qui mène à la superbe petite marina de Port Lonvilliers. C’est le meilleur trou à cyclones de l’île, complètement fermé et protégé de toutes les directions. Le chenal est vraiment très étroit mais il a été creusé pour avoir 3 mètres de fond. Il forme un bras de mer derrière la plage.
Nous dînerons pour la dernière fois sur « Na Maka » avec Agnès et Jean-Marie qui nous ont rejoint à la Anse Marcel. Nous partons le lendemain vers l’île de Saba tandis que Agnès et Jean-Marie se préparent à rentrer sur Toulouse dans 15 jours, en laissant « Na Maka » à Saint Martin, à vendre …
Nous avons décidé de visiter le maximum d’îles qui se présentent sur notre route, quitte à faire de petits détours.
La plupart des bateaux qui quittent St Martin pour le sud descendent directement sur Antigua. Nous préférons poursuivre la découverte des Antilles néerlandaises Sous le Vent, en passant par Saba et Saint Eustache (Statia de son petit nom). Je vous avoue que jusqu’il y a quelques mois, je ne connaissais même pas l’existence de ces petites îles.
Le 6 avril à 6H30 nous quittons la Anse Marcel et St Martin avec environ 15 nœuds de vent, juste assez pour que Petrushka aille bien. Les côtes de St Martin nous paraissent plus belles depuis que nous avons découvert d’autres mouillages que le Marigot. Un bout d’arc-en-ciel nous fait risette. Anguilla se prélasse, longue et plate, à tribord. Les îles se bousculent dans ce coin ; derrière nous, à part Anguilla au nord, on voit St Barth dans le prolongement sud de St Martin. En face de nous, Saba, notre destination du jour, et dans l’alignement sud-ouest, St Eustache, St Christopher (St Kitts pour les intimes) et Nevis.
La traversée est calme, sous genois et artimon. Nous évitons de hisser la grand-voile quand ce n’est pas absolument nécessaire, le bateau prend ainsi moins de gîte et c’est plus confortable. On perd un peu en vitesse bien sûr, mais nous ne sommes pas pressés. La houle est de sud-est et le vent aussi. Plus tard le vent faiblit et nous faisons les deux dernières heures au moteur.
Saba nous fait très forte impression. C’est un volcan éteint de seulement 3 km de diamètre, qui surgit de la mer en un pic de 940 mètres. Très spectaculaire ! La petite taille de l’île ne lui permet pas d’offrir beaucoup de protection contre la houle dominante. Nous mouillons à « Ladder Bay » (qui n’a rien d’une baie), sur l’un des cinq corps-morts disponibles, par presque 20 mètres de fond, au bord de la falaise qui plonge abruptement dans l’eau. Le paysage est grandiose. On se sent tout petits face à cette masse volcanique qui nous domine.
Nous sommes aux pieds du « Ladder », cet escalier de 800 marches creusées dans la roche, qui a longtemps été le seul moyen d’accès de l’île. Aujourd’hui un minuscule port a été construit, un peu plus au sud, ainsi qu’un petit aéroport sur la seule partie plate de l’île (uniquement pour pilotes chevronnés et passagers amateurs de sensations fortes !).
Nous passons la soirée à bord à admirer les tortues carets et le coucher de soleil, savourant notre bonheur d’être là. Le lendemain matin nous mettons l’annexe à l’eau, sans le moteur hors bord car les rouleaux qui déferlent sur les 20 mètres de galets noirs qui servent de plage de débarquement nous rendent méfiants. Nous arrivons sans encombre, malgré le petit vent et les vagues, au pied de cet escalier si raide que même un âne n’en voudrait pas. Nous gravissons courageusement les marches les unes après les autres. Il fait lourd. Une averse nous rafraîchit en arrivant à The Bottom, la petite capitale. Il y a seulement 3 villages sur cet îlot sauvage : le Bottom (qui est plus un « haut » qu’un « fond »), Windwardside et Hell’s Gate. Tout un programme ! Jusqu’en 1958, les villages n’étaient reliés que par de petits sentiers escarpés. Bien que des experts en génie civil aient déclaré que la construction d’une route était impossible sur un tel relief, les habitants leur ont donné tord en la construisant eux-mêmes. Et quelle route, avec de sérieuses grimpettes et des virages hyper serrés !
Les villages sont soignés, proprets et pittoresques, avec des maisons en bois blanches aux volets verts surmontées de toits rouges. La vie y est tranquille. Les habitants sont cordiaux et apprécient de tailler une bavette avec les rares visiteurs. La langue officielle est le néerlandais mais tous parlent anglais.
Après les formalités de clearance et un tour de l’île, nous redescendons le Ladder vers notre dinghy. Le vent s’est levé mais la mise à l’eau s’effectue sans problème malgré les vagues. Par contre le retour au bateau à la rame est épique. Nous avons le vent et la mer contre nous. On n’avance pas. Je dirai même qu’on recule, et vers le large. Je m’épuise à lutter contre le vent pendant que Christian m’encourage puis s’énerve devant mes faibles forces. Lui a de sérieux biscoteaux. Moi je ne suis qu’une faible femme (…). Bon, l’heure n’est pas aux engueulades ni à programmer la remise en forme de mes biceps. Face à l’urgence de la situation nous nous agrippons au premier (et d’ailleurs seul et unique) bateau situé entre la plage et Petrushka. Nous l’agrippons est bien le mot, nous souquons ferme pour y arriver, j’y mets mes dernières forces et nous l’attrapons de justesse avant que le courant nous fasse passer à côté. C’est un tout petit catamaran, il n’y a personne à bord , personne dans les environs, rien que les vagues et le vent, et Petrushka à 200 mètres à peine, inaccessible. Je reprends mon souffle, j’ai les muscles qui tremblent, tétanisés. Christian qui a eu la bonne idée d’emporter la VHF portable, appelle à la rescousse un bateau de plongée que nous avons aperçu auparavant. Mais il ne nous localise pas et la communication est mauvaise. Il ne faut compter que sur nous-mêmes. Profitant d’une petite accalmie de vent, nous décidons de repartir à la rame. Gros effort. Petits coups de rame rapides et cadencés (beaucoup plus efficace, soit dit en passant, que les longues brassées que me recommandait Christian jusqu’ici…) et nous y sommes ! 40 minutes pour parcourir 350 mètres ! Il me faudra une bonne sieste puis un petit bain de mer pour m’en remettre.
Entre-temps, le vent est devenu très fort, soufflant du nord et notre mouillage n’est pas abrité. La nuit sera agitée, Petrushka faisant des ruades et se cabrant sur son corps-mort. Rodéo dans une forte houle. Nous nous levons chacun plusieurs fois pour vérifier la tenue de notre amarre qui craque et vibre.
Au petit matin, nous nous concertons : nous aurions aimé approfondir notre découverte de Saba, mais dans de telles conditions il est préférable de poursuivre notre route et de chercher un mouillage plus abrité. Direction Statia.
Au mouillage, nous avions un vent rabattant de nord, mais en se dégageant de l’île de Saba, il se révèle être en réalité de SE, c'est-à-dire en plein pif ! Il est fort, d’environ 25 nœuds, et les creux atteignent 2,5 m. La navigation est très inconfortable. Petrushka enfourne sèchement dans les vagues. Le moteur tourne à 2000 tours et nous n’avançons qu’à 3,5 nœuds de moyenne. On prend des paquets de mer sur bâbord. Heureusement, le soleil est toujours là. Il forme des croûtes de sel sur le pont du bateau et sur notre peau.
La plupart des bateaux qui quittent St Martin pour le sud descendent directement sur Antigua. Nous préférons poursuivre la découverte des Antilles néerlandaises Sous le Vent, en passant par Saba et Saint Eustache (Statia de son petit nom). Je vous avoue que jusqu’il y a quelques mois, je ne connaissais même pas l’existence de ces petites îles.
Le 6 avril à 6H30 nous quittons la Anse Marcel et St Martin avec environ 15 nœuds de vent, juste assez pour que Petrushka aille bien. Les côtes de St Martin nous paraissent plus belles depuis que nous avons découvert d’autres mouillages que le Marigot. Un bout d’arc-en-ciel nous fait risette. Anguilla se prélasse, longue et plate, à tribord. Les îles se bousculent dans ce coin ; derrière nous, à part Anguilla au nord, on voit St Barth dans le prolongement sud de St Martin. En face de nous, Saba, notre destination du jour, et dans l’alignement sud-ouest, St Eustache, St Christopher (St Kitts pour les intimes) et Nevis.
La traversée est calme, sous genois et artimon. Nous évitons de hisser la grand-voile quand ce n’est pas absolument nécessaire, le bateau prend ainsi moins de gîte et c’est plus confortable. On perd un peu en vitesse bien sûr, mais nous ne sommes pas pressés. La houle est de sud-est et le vent aussi. Plus tard le vent faiblit et nous faisons les deux dernières heures au moteur.
Saba nous fait très forte impression. C’est un volcan éteint de seulement 3 km de diamètre, qui surgit de la mer en un pic de 940 mètres. Très spectaculaire ! La petite taille de l’île ne lui permet pas d’offrir beaucoup de protection contre la houle dominante. Nous mouillons à « Ladder Bay » (qui n’a rien d’une baie), sur l’un des cinq corps-morts disponibles, par presque 20 mètres de fond, au bord de la falaise qui plonge abruptement dans l’eau. Le paysage est grandiose. On se sent tout petits face à cette masse volcanique qui nous domine.
Nous sommes aux pieds du « Ladder », cet escalier de 800 marches creusées dans la roche, qui a longtemps été le seul moyen d’accès de l’île. Aujourd’hui un minuscule port a été construit, un peu plus au sud, ainsi qu’un petit aéroport sur la seule partie plate de l’île (uniquement pour pilotes chevronnés et passagers amateurs de sensations fortes !).
Nous passons la soirée à bord à admirer les tortues carets et le coucher de soleil, savourant notre bonheur d’être là. Le lendemain matin nous mettons l’annexe à l’eau, sans le moteur hors bord car les rouleaux qui déferlent sur les 20 mètres de galets noirs qui servent de plage de débarquement nous rendent méfiants. Nous arrivons sans encombre, malgré le petit vent et les vagues, au pied de cet escalier si raide que même un âne n’en voudrait pas. Nous gravissons courageusement les marches les unes après les autres. Il fait lourd. Une averse nous rafraîchit en arrivant à The Bottom, la petite capitale. Il y a seulement 3 villages sur cet îlot sauvage : le Bottom (qui est plus un « haut » qu’un « fond »), Windwardside et Hell’s Gate. Tout un programme ! Jusqu’en 1958, les villages n’étaient reliés que par de petits sentiers escarpés. Bien que des experts en génie civil aient déclaré que la construction d’une route était impossible sur un tel relief, les habitants leur ont donné tord en la construisant eux-mêmes. Et quelle route, avec de sérieuses grimpettes et des virages hyper serrés !
Les villages sont soignés, proprets et pittoresques, avec des maisons en bois blanches aux volets verts surmontées de toits rouges. La vie y est tranquille. Les habitants sont cordiaux et apprécient de tailler une bavette avec les rares visiteurs. La langue officielle est le néerlandais mais tous parlent anglais.
Après les formalités de clearance et un tour de l’île, nous redescendons le Ladder vers notre dinghy. Le vent s’est levé mais la mise à l’eau s’effectue sans problème malgré les vagues. Par contre le retour au bateau à la rame est épique. Nous avons le vent et la mer contre nous. On n’avance pas. Je dirai même qu’on recule, et vers le large. Je m’épuise à lutter contre le vent pendant que Christian m’encourage puis s’énerve devant mes faibles forces. Lui a de sérieux biscoteaux. Moi je ne suis qu’une faible femme (…). Bon, l’heure n’est pas aux engueulades ni à programmer la remise en forme de mes biceps. Face à l’urgence de la situation nous nous agrippons au premier (et d’ailleurs seul et unique) bateau situé entre la plage et Petrushka. Nous l’agrippons est bien le mot, nous souquons ferme pour y arriver, j’y mets mes dernières forces et nous l’attrapons de justesse avant que le courant nous fasse passer à côté. C’est un tout petit catamaran, il n’y a personne à bord , personne dans les environs, rien que les vagues et le vent, et Petrushka à 200 mètres à peine, inaccessible. Je reprends mon souffle, j’ai les muscles qui tremblent, tétanisés. Christian qui a eu la bonne idée d’emporter la VHF portable, appelle à la rescousse un bateau de plongée que nous avons aperçu auparavant. Mais il ne nous localise pas et la communication est mauvaise. Il ne faut compter que sur nous-mêmes. Profitant d’une petite accalmie de vent, nous décidons de repartir à la rame. Gros effort. Petits coups de rame rapides et cadencés (beaucoup plus efficace, soit dit en passant, que les longues brassées que me recommandait Christian jusqu’ici…) et nous y sommes ! 40 minutes pour parcourir 350 mètres ! Il me faudra une bonne sieste puis un petit bain de mer pour m’en remettre.
Entre-temps, le vent est devenu très fort, soufflant du nord et notre mouillage n’est pas abrité. La nuit sera agitée, Petrushka faisant des ruades et se cabrant sur son corps-mort. Rodéo dans une forte houle. Nous nous levons chacun plusieurs fois pour vérifier la tenue de notre amarre qui craque et vibre.
Au petit matin, nous nous concertons : nous aurions aimé approfondir notre découverte de Saba, mais dans de telles conditions il est préférable de poursuivre notre route et de chercher un mouillage plus abrité. Direction Statia.
Au mouillage, nous avions un vent rabattant de nord, mais en se dégageant de l’île de Saba, il se révèle être en réalité de SE, c'est-à-dire en plein pif ! Il est fort, d’environ 25 nœuds, et les creux atteignent 2,5 m. La navigation est très inconfortable. Petrushka enfourne sèchement dans les vagues. Le moteur tourne à 2000 tours et nous n’avançons qu’à 3,5 nœuds de moyenne. On prend des paquets de mer sur bâbord. Heureusement, le soleil est toujours là. Il forme des croûtes de sel sur le pont du bateau et sur notre peau.
Arrivée à Statia vers 15H00, à Oranjestad, la seule petite ville de l’île. Il y a ici une vraie baie et même si elle est très ouverte nous sommes plus abrités qu’à Saba. Nous nous installons calmement. Nous sommes samedi et nous ne comptons pas trop nous montrer aux autorités, pour éviter les formalités d’entrée (les bureaux sont fermés le WE). Le lendemain nous partons à la découverte d’Oranjestad, le fort, les nombreuses églises de confessions différentes, les cimetières, les ruines de la synagogue, l’ancien chemin des esclaves, …
Christian a sympathisé avec un grand chien jaune qui nous suit partout, de point d’ombre en point d’ombre. Une caresse et le voilà adopté. Statia est à la fois assez jolie mais un peu déserte, assez coquette dans l’ensemble mais un peu sale dans les coins, l’ambiance est feutrée, un peu étrange. La population est majoritairement noire, beaucoup de rastas. Le dimanche dans ces petites îles, après la distraction matinale de la messe, il reste la bière et la télé. Un peu comme dans certaines de nos campagnes…
Il est assez difficile d’imaginer que cette île minuscule a été autrefois le centre du commerce des Antilles ; pendant la guerre d’indépendance américaine, quand les colonies britanniques fidèles n’eurent plus le droit de commerce avec les rebelles américaines, Statia la hollandaise profita de sa neutralité pour commercer avec les deux parties sans se poser trop de questions. La petite population devint alors très riche. Plus tard, lorsque la Grande-Bretagne déclara la guerre aux Pays-Bas, l’amiral Rodney mit à sac Statia et lui confisqua ses richesses. Aujourd’hui, les ressources de l’île sont l’agriculture et la pêche, et récemment des équipements de stockage et de réapprovisionnement en produits pétroliers sont venus aider l’économie de la plus pauvre des îles des Antilles néerlandaises. Le tourisme est devenu la première ressource, Statia étant une destination pour voyageurs avertis qui apprécient sa tranquillité.
Lundi 10 avril, départ à 7H00 pour St Kitts. Le vent s’est levé à nouveau et souffle à 30 nœuds. Il est debout. La mer aussi est contre nous. Très inconfortable. Petrushka nous joue la seconde version de « La Chevauchée Fantastique ». Je me repose deux heures dans la bannette en regardant, par le panneau du carré, Christian ramasser vagues et embruns (chaque fois qu’il se fait rincer, je me renfonce plus confortablement dans ma bannette ; des fois, c’est bien d’être une faible femme…). Heureusement, il n’y a pas très loin jusque St Kitts et dès la pointe de l’île, la terre nous protège et les conditions sont plus faciles. Je me lève donc pour admirer la côte. L’île est très belle, très verte. Elle compte deux massifs volcaniques et beaucoup de vieilles pierres et d’anciennes distilleries.
Côte Nord Ouest de St Kitts; île verte en vue...Il est assez difficile d’imaginer que cette île minuscule a été autrefois le centre du commerce des Antilles ; pendant la guerre d’indépendance américaine, quand les colonies britanniques fidèles n’eurent plus le droit de commerce avec les rebelles américaines, Statia la hollandaise profita de sa neutralité pour commercer avec les deux parties sans se poser trop de questions. La petite population devint alors très riche. Plus tard, lorsque la Grande-Bretagne déclara la guerre aux Pays-Bas, l’amiral Rodney mit à sac Statia et lui confisqua ses richesses. Aujourd’hui, les ressources de l’île sont l’agriculture et la pêche, et récemment des équipements de stockage et de réapprovisionnement en produits pétroliers sont venus aider l’économie de la plus pauvre des îles des Antilles néerlandaises. Le tourisme est devenu la première ressource, Statia étant une destination pour voyageurs avertis qui apprécient sa tranquillité.
Lundi 10 avril, départ à 7H00 pour St Kitts. Le vent s’est levé à nouveau et souffle à 30 nœuds. Il est debout. La mer aussi est contre nous. Très inconfortable. Petrushka nous joue la seconde version de « La Chevauchée Fantastique ». Je me repose deux heures dans la bannette en regardant, par le panneau du carré, Christian ramasser vagues et embruns (chaque fois qu’il se fait rincer, je me renfonce plus confortablement dans ma bannette ; des fois, c’est bien d’être une faible femme…). Heureusement, il n’y a pas très loin jusque St Kitts et dès la pointe de l’île, la terre nous protège et les conditions sont plus faciles. Je me lève donc pour admirer la côte. L’île est très belle, très verte. Elle compte deux massifs volcaniques et beaucoup de vieilles pierres et d’anciennes distilleries.
Obligation de faire les formalités de douane et d’immigration à Basseterre, la capitale, avant de pouvoir aller mouiller ailleurs. Basseterre c’est un peu l’enfer pour le plaisancier. Nous voulons accoster à la marina, le temps de faire les formalités, mais on ne veut pas de nous et nous sommes renvoyés vers le « Deep Water Port », tout à fait de l’autre côté de la baie, au sud, au milieu des cargos et des gros rafiots de pêche.
On ancre face à un dock cradingue. On débarque au milieu de rochers glissants, sans même un piquet pour sécuriser notre annexe. Il faut traverser une zone portuaire pas très nette, au milieu des débarquements de containers. Ensuite il faut chercher les bureaux de la douane dans des baraquements miteux. Il est 15H30 et les quelques fonctionnaires sont déjà très fatigués… Pour les formalités d’immigration ? Et bien il faut retourner en ville au bureau de police. Nous reprenons notre annexe direction la marina, en passant sous les piles du débarcadère pour les énormes paquebots de croisière (il y a là le Golden Princess et le Queen Mary 2). Nous voulons laisser notre dinghy à la marina mais ce n’est possible que moyennant 5 US$. Ca commence à être fort …ce cirque ! Tout est fait ici pour les visiteurs des paquebots de luxe, les autres on les parque côté poubelle ! Dégoûtés, nous allons amarrer notre annexe au dock des pêcheurs à côté. C’est pas pratique, il faut escalader un mur de 2,5 m sur des gros pneus de camion bien peu ragoûtants. Avec ma jupette, ils rigolent bien les pêcheurs ! Et pour couronner le tout, le bureau de police est fermé !
Basseterre est la ville coloniale la mieux préservée des Antilles anglaises. Elle ne nous fait cependant pas un gros effet. Nos mésaventures d’arrivée ne nous aident pas sans doute à la considérer avec bienveillance. La nuit sera de plus à nouveau difficile, avec de grosses rafales de vent. Petrushka tire sur sa chaîne et roule beaucoup.
Le lendemain, courbaturés, nous sommes pressés de quitter Basseterre après les paperasses d’immigration. Nous trouvons asile dans la jolie baie de White House, au SO de St Kitts. C’est un beau mouillage sauvage, juste une plage avec de gros galets où des vaches viennent s’abreuver le soir (j’ignorais que les vaches pouvaient boire l’eau de mer…). Nous sommes entourés de collines rocheuses et sèches. Entre deux de ces collines, en face, on distingue le sommet du volcan de Nevis, l’île voisine et politiquement unie à St Kitts au sein d’une même fédération indépendante depuis 1983. Aux extrémités de la baie il y a de gros cailloux qui se prolongent dans l’eau. Notre carte marine nous indique de ne pas les approcher de trop près. Quand nous plongerons avec nos masques et tubas, nous y trouverons l’épave d’un chalutier.
Après une nuit tranquille -la première depuis St Martin- nous partons découvrir notre environnement. On se croirait plus en Ecosse qu’aux Antilles. Des collines couvertes de maigre végétation où courent des vaches et des chèvres. Un grand lac salé, asséché à cette époque de l’année, dégage un fumet vaseux. C’est une ancienne saline. On fait un brin de causette avec un pêcheur solitaire installé sur un caillou, qui remonte un long poisson au nez pointu toutes les 3 minutes (ben non, pas toujours le même poisson…). Il nous explique qu’il y a des singes dans les collines, les seuls qu’on trouve dans les Petites Antilles ; des grands noirs et des petits verts. Mais nous ne verrons pas la queue d’un durant les deux jours paisibles et agréables que nous passons à White House.
Discussion entre pêcheurs....Basseterre est la ville coloniale la mieux préservée des Antilles anglaises. Elle ne nous fait cependant pas un gros effet. Nos mésaventures d’arrivée ne nous aident pas sans doute à la considérer avec bienveillance. La nuit sera de plus à nouveau difficile, avec de grosses rafales de vent. Petrushka tire sur sa chaîne et roule beaucoup.
Le lendemain, courbaturés, nous sommes pressés de quitter Basseterre après les paperasses d’immigration. Nous trouvons asile dans la jolie baie de White House, au SO de St Kitts. C’est un beau mouillage sauvage, juste une plage avec de gros galets où des vaches viennent s’abreuver le soir (j’ignorais que les vaches pouvaient boire l’eau de mer…). Nous sommes entourés de collines rocheuses et sèches. Entre deux de ces collines, en face, on distingue le sommet du volcan de Nevis, l’île voisine et politiquement unie à St Kitts au sein d’une même fédération indépendante depuis 1983. Aux extrémités de la baie il y a de gros cailloux qui se prolongent dans l’eau. Notre carte marine nous indique de ne pas les approcher de trop près. Quand nous plongerons avec nos masques et tubas, nous y trouverons l’épave d’un chalutier.
Après une nuit tranquille -la première depuis St Martin- nous partons découvrir notre environnement. On se croirait plus en Ecosse qu’aux Antilles. Des collines couvertes de maigre végétation où courent des vaches et des chèvres. Un grand lac salé, asséché à cette époque de l’année, dégage un fumet vaseux. C’est une ancienne saline. On fait un brin de causette avec un pêcheur solitaire installé sur un caillou, qui remonte un long poisson au nez pointu toutes les 3 minutes (ben non, pas toujours le même poisson…). Il nous explique qu’il y a des singes dans les collines, les seuls qu’on trouve dans les Petites Antilles ; des grands noirs et des petits verts. Mais nous ne verrons pas la queue d’un durant les deux jours paisibles et agréables que nous passons à White House.
Le 13 avril, nous appareillons pour Nevis. Il n’y a que les « Narrows » à traverser entre ces deux îles qui font partie du même plateau rocheux sous-marin. Après avoir tiré quelques bords à la voile, on remballe tout en arrivant près des côtes de Nevis, faute de vent favorable. Il s’est établi ESE.
On longe la côte ouest, c’est vert, c’est joli, c’est coquet, c’est plein d’infrastructures touristiques plutôt sympas, genre farés et huttes de plage. On s’arrête à Charlestown, la petite capitale, pour les traditionnelles formalités (et oui, il faut refaire les formalités de douane, mais pas d’immigration !). La petite ville est mignonne, nette et accueillante. Pas grand-chose à voir, on a vite fait le tour. On se prend un « take away » chinois qui sera bien remué dans l’annexe au retour. Miam, la sauce aigre douce dans mes nouilles au vinaigre !
Le "parking" des annexes
Le mouillage est extrêmement rouleur et pour tout dire intenable. Nous bougeons donc pour aller plus près de la plage. C’est à peine mieux. Une nouvelle nuit difficile en perspective. Mais quelle vie on mène!
14 avril 2006, arrivée à Montserrat.
Montserrat est une petite île de 100 km² dans les Iles Sous le Vent. Malgré quelques invasions françaises aux 17è et 18è siècle, elle a toujours été sous domination britannique, depuis sa colonisation par des catholiques irlandais dans la première moitié du 17è S. En 1967, Montserrat est devenue autonome en tant que colonie de la Couronne Britannique et est aujourd’hui un territoire d’outre-mer du Royaume-Uni.
Son histoire récente est tragique. Le volcan la Soufrière s’est réveillé en 1995 après des siècles d’inactivité. L’éruption était annoncée et la population avait été évacuée. L’éruption recouvrit de cendres et de pierres la capitale Plymouth, faisant quelques victimes parmi ceux qui n’avaient pas obéi aux ordres d’évacuation. Plusieurs autres éruptions ont eu lieu au cours des années suivantes. Aujourd’hui encore, les deux tiers de l’île, au sud, le plus fertile, est zone interdite car l’activité volcanique persiste. Cette zone comprend un secteur de un mile de large en mer. Les bateaux ne peuvent pénétrer dans cette zone à cause des coulées de lave pyroclastique à très haute température qui arrivent dans la mer. Le tiers restant de l’île, au nord, est montagneux et offre un choix de randonnées ainsi que d’excellents points d’observation du volcan et de ses effets.
Nous mouillons à Little Bay. Il y a trois bateaux au mouillage. Comme son nom l’indique, c’est très petit. C’est pourtant le seul endroit d’accès par la mer. C’est aussi très exposé. Nous y passerons deux nuits très rouleuses et inconfortables. Quand nous arrivons, des enfants se baignent dans l’eau sur la plage de sable noir, très abrupte. Il y a quelques gabarres colorées au bout de la plage et une minuscule jetée de l’autre côté, pour (d’improbables ?) navettes. Le lendemain, à 6H00, s’y présente un gros caboteur avec des containers, qui frôle Petrushka. On se sent tout petit dans ces cas-là. Comme il n’y a personne sur le quai pour prendre ses amarres, il va patienter une bonne heure au large avant de venir refaire sa manœuvre. Nous l’observons avant de descendre à terre.
Le tampon des services de l’immigration sur nos passeports coûte très cher. C’est gratuit en semaine, mais nous nous présentons le samedi matin. Si nous avions su, nous nous serions dépêchés hier après-midi pour venir faire ces formalités !
L’officier de douane nous a appelé un de ses copains taximan pour faire le tour de l’île. On ne peut en effet pénétrer en zone interdite qu’avec une personne autorisée. Dali nous emmène donc voir les restes de Plymouth et les énormes coulées de cendre qui ont tout enseveli. Il ne reste quasi rien de cette petite capitale florissante. Dali nous montre différents endroits d’où nous pouvons mesurer l’ampleur du sinistre. Aux abords de Plymouth, beaucoup de grandes et belles villas sont encore debout, mais leur toit est troué par les nuées ardentes et la cendre s’est infiltrée partout. Spectacle de désolation. Pas un bruit, pas une âme qui vive là. C’est poignant. Dali nous montre le quartier où il avait sa maison. Il a dû la quitter comme tous les autres. Lui a choisi de rester malgré tout sur l’île et de reconstruire sa vie un peu plus loin. Environ 5.000 habitants vivent aujourd’hui dans le nord, contre 20.000 avant la catastrophe. Ils tentent de reconstruire ce bout d’île qui leur reste. Le secteur du bâtiment est le principal employeur de l’île. Le gouvernement britannique fournit beaucoup d’aides pour reconstruire les principales infrastructures et donne des subsides aux particuliers.
14 avril 2006, arrivée à Montserrat.
Montserrat est une petite île de 100 km² dans les Iles Sous le Vent. Malgré quelques invasions françaises aux 17è et 18è siècle, elle a toujours été sous domination britannique, depuis sa colonisation par des catholiques irlandais dans la première moitié du 17è S. En 1967, Montserrat est devenue autonome en tant que colonie de la Couronne Britannique et est aujourd’hui un territoire d’outre-mer du Royaume-Uni.
Son histoire récente est tragique. Le volcan la Soufrière s’est réveillé en 1995 après des siècles d’inactivité. L’éruption était annoncée et la population avait été évacuée. L’éruption recouvrit de cendres et de pierres la capitale Plymouth, faisant quelques victimes parmi ceux qui n’avaient pas obéi aux ordres d’évacuation. Plusieurs autres éruptions ont eu lieu au cours des années suivantes. Aujourd’hui encore, les deux tiers de l’île, au sud, le plus fertile, est zone interdite car l’activité volcanique persiste. Cette zone comprend un secteur de un mile de large en mer. Les bateaux ne peuvent pénétrer dans cette zone à cause des coulées de lave pyroclastique à très haute température qui arrivent dans la mer. Le tiers restant de l’île, au nord, est montagneux et offre un choix de randonnées ainsi que d’excellents points d’observation du volcan et de ses effets.
Nous mouillons à Little Bay. Il y a trois bateaux au mouillage. Comme son nom l’indique, c’est très petit. C’est pourtant le seul endroit d’accès par la mer. C’est aussi très exposé. Nous y passerons deux nuits très rouleuses et inconfortables. Quand nous arrivons, des enfants se baignent dans l’eau sur la plage de sable noir, très abrupte. Il y a quelques gabarres colorées au bout de la plage et une minuscule jetée de l’autre côté, pour (d’improbables ?) navettes. Le lendemain, à 6H00, s’y présente un gros caboteur avec des containers, qui frôle Petrushka. On se sent tout petit dans ces cas-là. Comme il n’y a personne sur le quai pour prendre ses amarres, il va patienter une bonne heure au large avant de venir refaire sa manœuvre. Nous l’observons avant de descendre à terre.
Le tampon des services de l’immigration sur nos passeports coûte très cher. C’est gratuit en semaine, mais nous nous présentons le samedi matin. Si nous avions su, nous nous serions dépêchés hier après-midi pour venir faire ces formalités !
L’officier de douane nous a appelé un de ses copains taximan pour faire le tour de l’île. On ne peut en effet pénétrer en zone interdite qu’avec une personne autorisée. Dali nous emmène donc voir les restes de Plymouth et les énormes coulées de cendre qui ont tout enseveli. Il ne reste quasi rien de cette petite capitale florissante. Dali nous montre différents endroits d’où nous pouvons mesurer l’ampleur du sinistre. Aux abords de Plymouth, beaucoup de grandes et belles villas sont encore debout, mais leur toit est troué par les nuées ardentes et la cendre s’est infiltrée partout. Spectacle de désolation. Pas un bruit, pas une âme qui vive là. C’est poignant. Dali nous montre le quartier où il avait sa maison. Il a dû la quitter comme tous les autres. Lui a choisi de rester malgré tout sur l’île et de reconstruire sa vie un peu plus loin. Environ 5.000 habitants vivent aujourd’hui dans le nord, contre 20.000 avant la catastrophe. Ils tentent de reconstruire ce bout d’île qui leur reste. Le secteur du bâtiment est le principal employeur de l’île. Le gouvernement britannique fournit beaucoup d’aides pour reconstruire les principales infrastructures et donne des subsides aux particuliers.
Plymouth, ou ce qu'il en reste...
L’île était pourtant prospère et attirait des hôtes prestigieux. La maison de Paul Mac Cartney est intacte, hors zone interdite. Mais il paraît qu’il vient beaucoup moins souvent.
Nous allons voir l’Observatoire et ses nombreux systèmes de monitoring. Ce jour-là, le volcan est très actif. Il crache des panaches de vapeur ou de cendre à plusieurs centaines de mètres de hauteur. En cas d’éruption, cela peut aller jusqu’à 17.000 mètres d’altitude ! Assez effrayant. La prochaine est prévue dans l’année qui vient.
Nous allons voir l’Observatoire et ses nombreux systèmes de monitoring. Ce jour-là, le volcan est très actif. Il crache des panaches de vapeur ou de cendre à plusieurs centaines de mètres de hauteur. En cas d’éruption, cela peut aller jusqu’à 17.000 mètres d’altitude ! Assez effrayant. La prochaine est prévue dans l’année qui vient.
Cratère fumant
Nous quittons Montserrat le 16 avril, en longeant la côte d’aussi près que permis. On a la gorge nouée. Cette île est si belle, si verte et si tranquille, puis plus loin n’est plus que cendres et ruines. La Nature est capable de tels déchaînements de fureur parfois. Le volcan lâche aujourd’hui encore de gros nuages jaunâtres, brunâtres, en forme de champignon, qui s’élèvent droit dans le ciel. Il n’y a pas de vent. La mer est d’huile. Pas une seule ride à la surface. Panne totale d’alizé.
Nous ferons donc au moteur les 40 miles qui nous séparent de la Guadeloupe. Heureusement que deux dauphins viennent animer un peu la traversée. Ils nous accompagnent pendant 10 minutes, précèdent le bateau, puis dessinent des courbes d’un côté à l’autre de Petrushka. On jurerait qu’ils s’amusent. On les admire à l’étrave du bateau, on essaie de les toucher. C’est assez jubilatoire.
Arrivée à Deshaies en fin d’après-midi, à l’extrême NO de la Guadeloupe. On vient d’attraper un magnifique thazard de près de un mètre de long avec notre ligne de traîne. Christian le nettoie en arrivant, pendant que je frotte les grosses tâches de sang qu’il a laissées sur le pont arrière. On garde pour nous environ le tiers du poisson et le reste, Christian va le proposer aux bateaux voisins. Il y a du monde dans cette petite baie bien abritée, très fermée. C’est le passage quasi obligé des bateaux qui quittent la Guadeloupe et de ceux qui y arrivent. L’endroit est charmant. On y reste 3 jours. On y revoit nos deux « sirènes », Delphine et Nise, les gendarmes que nous avions rencontrées à Port-Louis lors de notre voyage aller. Elles nous invitent au resto, et nous invitent encore pour la semaine suivante chez Nise à Pointe-à-Pitre. Très sympa.
A Deshaies, nous visitons le superbe jardin botanique sur les hauteurs de la baie.
Coluche avait acheté le terrain et y avait fait construire une jolie villa. Plus tard il a cédé le terrain à l’Administration, tout en se gardant l’usage de la maison quelques semaines par an.
Fleurs tropicales
Fleurs tropicales
Avant de retourner à Pointe-à-Pitre, nous faisons une escale à la « Anse à la Barque » sur la côte SO. La anse est jolie, petite, simple et paisible. Une courte plage et un beau phare blanc au milieu.
On repart le lendemain, sans même avoir débarqué. Nous décidons de faire un petit crochet vers Les Saintes, que nous avions tellement apprécié lors du voyage aller. Le vent nous est contraire ainsi que la houle et c’est donc une autre navigation au moteur. Nous reprenons contact avec le voilier local (voilier = fabricant et réparateur de voiles) pour lui commander la confection d’un bimini (toile qui permet de protéger le cockpit du soleil).
Nous repartons dès le lendemain vers PAP où quelques travaux nous attendent : installation des deux panneaux solaires fixes, vérification du moteur, du presse-étoupe, du feu de tête de mât, du gréement, …
Nous repartons dès le lendemain vers PAP où quelques travaux nous attendent : installation des deux panneaux solaires fixes, vérification du moteur, du presse-étoupe, du feu de tête de mât, du gréement, …
Enfin une jolie navigation à la voile, au près, jusqu’à l’entrée de la marina de la Pointe. Nous restons là 4 jours. Depuis notre départ de la Martinique début février, nous n’avions plus mis les pieds dans une marina. J’apprécie les douches tièdes qu’on peut y prendre autant de fois que souhaité, mais nous apprécions moins le bruit, la promiscuité et le manque d’horizon. Vivement le retour des mouillages sauvages.
Nous retournons aux Saintes prendre livraison de notre bimini, qu’il faudra retailler deux fois. Et le résultat final n’est guère satisfaisant. Cette fois, « Phil à Voile » nous déçoit quelque peu. Nous passons saluer notre copain Raoul, l’agent secret retraité. Nous passons avec lui un super moment. Nous rencontrons encore aux Saintes un autre personnage. Un aventurier, un vrai ! Il s’appelle Jacques Boone. Il a fait tous les métiers, de planteur de café à trafiquant de rhum, a construit un bateau en pleine forêt camerounaise, l’a fait transporter sur un vieux bus jusqu’à la mer, en payant les frais du voyage avec les visites du navire par les habitants des villages rencontrés. Il a traversé l’Atlantique, s’est échoué sur un cailloux en Guadeloupe, est rentré en France, puis revenu rouler sa bosse aux Antilles. Il a écrit plusieurs livres de ses aventures. Il habite à présent ici, au-dessus de la plage du Pain de Sucre et vit de la location de deux bungalows tout mignons qu’il a construits lui-même. La vue est imprenable ! Jacques est aujourd’hui un vieux monsieur de 80 ans un peu hanté par la mort et la maladie. Mais quelle vie !
Des Saintes, nous repartons vers la Dominique, sous voiles cette fois. Le vent de SSE nous oblige à aller plus au large que nécessaire. Le dernier bord vers Portsmouth nous fait filer à 6,5 – 7 nœuds de moyenne, avec une pointe à 8,3. Pour Petrushka, c’est pas mal du tout. Christian est content.
Les boat-boys du comité d’accueil sont là. Tandis que je discute avec l’un d’eux, Christian qui a plongé pour vérifier notre ancre, commence à crier et à gesticuler dans l’eau : il se fait piquer par les brûlures de minuscules méduses. Des bébés sans doute. L’eau se réchauffe doucement et c’est sans doute la période de reproduction qui commence. Question bobos, j’ai moi une inflammation à l’aine qui commence à prendre du volume. Mais rien de grave ni pour l’un ni pour l’autre.
Nous ne nous attardons pas à la Dominique et, de Portsmouth, nous allons directement sur Saint-Pierre, à la Martinique. La navigation est bonne. On a hissé la Suédoise (au lieu de la Grand-Voile. C’est une voile plus petite et dont le point d’écoute est plus haut que celui de la GV, ce qui laisse plus de vent au Genois), le Solent, un bout de Genois et l’Artimon. On file à 6 nœuds de moyenne, avec des pointes à 7,5. Vent d’ESE de 25 à 30 nœuds. On gîte pas mal. Christian fait une courte sieste puis c’est mon tour. A mon réveil, on est très gîté et on avance vite. Un peu impressionnée, je pense à la traversée du même canal en sens inverse… Mais cette fois tout se passe bien.
Nous retournons aux Saintes prendre livraison de notre bimini, qu’il faudra retailler deux fois. Et le résultat final n’est guère satisfaisant. Cette fois, « Phil à Voile » nous déçoit quelque peu. Nous passons saluer notre copain Raoul, l’agent secret retraité. Nous passons avec lui un super moment. Nous rencontrons encore aux Saintes un autre personnage. Un aventurier, un vrai ! Il s’appelle Jacques Boone. Il a fait tous les métiers, de planteur de café à trafiquant de rhum, a construit un bateau en pleine forêt camerounaise, l’a fait transporter sur un vieux bus jusqu’à la mer, en payant les frais du voyage avec les visites du navire par les habitants des villages rencontrés. Il a traversé l’Atlantique, s’est échoué sur un cailloux en Guadeloupe, est rentré en France, puis revenu rouler sa bosse aux Antilles. Il a écrit plusieurs livres de ses aventures. Il habite à présent ici, au-dessus de la plage du Pain de Sucre et vit de la location de deux bungalows tout mignons qu’il a construits lui-même. La vue est imprenable ! Jacques est aujourd’hui un vieux monsieur de 80 ans un peu hanté par la mort et la maladie. Mais quelle vie !
Des Saintes, nous repartons vers la Dominique, sous voiles cette fois. Le vent de SSE nous oblige à aller plus au large que nécessaire. Le dernier bord vers Portsmouth nous fait filer à 6,5 – 7 nœuds de moyenne, avec une pointe à 8,3. Pour Petrushka, c’est pas mal du tout. Christian est content.
Les boat-boys du comité d’accueil sont là. Tandis que je discute avec l’un d’eux, Christian qui a plongé pour vérifier notre ancre, commence à crier et à gesticuler dans l’eau : il se fait piquer par les brûlures de minuscules méduses. Des bébés sans doute. L’eau se réchauffe doucement et c’est sans doute la période de reproduction qui commence. Question bobos, j’ai moi une inflammation à l’aine qui commence à prendre du volume. Mais rien de grave ni pour l’un ni pour l’autre.
Nous ne nous attardons pas à la Dominique et, de Portsmouth, nous allons directement sur Saint-Pierre, à la Martinique. La navigation est bonne. On a hissé la Suédoise (au lieu de la Grand-Voile. C’est une voile plus petite et dont le point d’écoute est plus haut que celui de la GV, ce qui laisse plus de vent au Genois), le Solent, un bout de Genois et l’Artimon. On file à 6 nœuds de moyenne, avec des pointes à 7,5. Vent d’ESE de 25 à 30 nœuds. On gîte pas mal. Christian fait une courte sieste puis c’est mon tour. A mon réveil, on est très gîté et on avance vite. Un peu impressionnée, je pense à la traversée du même canal en sens inverse… Mais cette fois tout se passe bien.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire